Tauba, « juive de Bessarabie à Paris ; Ma mère courage », de Nina Kehayan

mardi 1er novembre 2016


C’est l’histoire d’une mère et de sa fille, de Tauba et de Nina, que raconte le livre de Nina Kehayan : « Tauba, juive de Bessarabie à Paris ; ma mère courage », tout récemment paru aux éditions « Le Bord de l’eau ». Un livre magnifique et bouleversant.


Vous connaissez Nina Kehayan, ancienne professeur de russe à Marseille, aujourd’hui traductrice littéraire et écrivain ; vous avez sans doute lu « Rue du prolétaire rouge », qu’elle a co-écrit avec Jean Kenayan à la fin des années 70 (500.000 exemplaires vendus !) ou ses savoureux « Voyages de l’aubergine » (que les éditions de l’Aube s’apprêtent d’ailleurs à rééditer), entre autres parutions… Le récit qu’elle nous propose aujourd’hui, dans un livre à la belle écriture fluide, est celui de la vie extraordinaire d’une jeune juive de Bessarabie, partie seule, à tout juste 20 ans, de sa ville natale Calarasi, un matin d’août 1928, passée par Berlin, puis Liège, enfin arrivée à Paris en 1930 après mille aventures et autant de rencontres… dont celle de l’homme de sa vie, Moysze, juif polonais, qui deviendra son mari et lui donnera deux enfants. Moysze, un « grand maigre au doux visage », ardent militant syndicaliste et communiste, auprès duquel elle apprendra à « être présente au monde ».


Née dans le Paris d’après-guerre, Nina a été élevée avec son frère au sein d’un foyer uni, auprès d’un père tendre et d’une mère attentive, certes, mais distante, pudique, se livrant peu – rien du modèle de la « mère juive » ! et dont elle ne tira jamais que par bribes les souvenirs de sa vie mouvementée. Ce n’est que dans son grand âge que Tauba accepta de parler à sa fille, devant un magnétophone, convaincue par son époux qu’il lui fallait « laisser des traces ».


Elle ne lui a pas « tout dit » mais ce qu’elle lui a dit, Nina l’a reçu « comme une offrande » … Et cette offrande, elle ne l’a pas gardée pour elle, heureusement ! Elle nous en fait à présent le cadeau, en y ajoutant celui de sa vie à elle, sa vie de femme présente auprès de sa mère jusqu’au bout de ses ans, et lui vouant finalement admiration et reconnaissance. Une superbe histoire de fidélités ; une histoire d’amour, tout simplement.


 Jacques Bonnadier


« Tauba, juive de Bessarabie à Paris ; Ma mère courage », de Nina Kehayan est paru aux éditions « La bord de l’eau ». 180 pages, 17 euros.