Pour honorer Pierre Gallocher, prêtre, journaliste, photographe, écrivain, chantre de Marseille et frère des hommes, à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance le 29 septembre 1921… à Fontainebleau. 1er épîsode.

dimanche 26 septembre 2021


Pour honorer Pierre Gallocher, prêtre, journaliste, photographe, écrivain, chantre de Marseille et frère des hommes, à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance le 29 septembre 1921… à Fontainebleau. 1er épîsode.
Né à Fontainebleau, oui, mais conçu à Marseille… avant que son père, ancien cap-hornier devenu officier de Marine Marchande aux Messageries Maritimes, ne parte en Extrême-Orient. Pierre Gallocher a dédié son livre « Méditerranée, mer cruelle » à cet homme qui avait choisi la mer, et qui, après avoir commencé à la voile comme mousse, la sillonna ensuite trente-huit années durant. Après quoi, le jeune Pierre devint très vite un enfant de Marseille. Un vrai Marseillais ! Avé l’accent !
Dans sa famille maternelle, on comptait beaucoup d’artistes, dont sa mère elle-même musicienne. On le sait peu : Pierre était capable de jouer de divers instruments : accordéon, piano, flûte, guitare… Il animait volontiers des veillées au cours desquelles il chantait, en s’accompagnant à la guitare, des chansons de Brel, de Brassens, du Père Duval. Le 29 septembre 1996, jour où ses cendres ont été mises en terre, à Cordéac, nous avons entendu un enregistrement d’une chanson de lui, chantée par lui : Si j’oubliais un jour de Te crier merci, composée vers les années 64-66. Une parmi d’autres, car il en composa plusieurs, paroles et musiques.
Je rappellerai tout ce que Marseille doit au reporter, au chroniqueur, à l’écrivain, au photographe Pierre Gallocher. J’évoquerai ses Zigzags dans le passé et sa douzaine d’autres livres sur Marseille, la Provence, la mer et la montagne… Quelques mots d’abord de sa vie « avant ». Du quartier de La Rose, où il vit avec ses parents et ses deux grandes sœurs, il se rend chaque jour à vélo au Petit Séminaire. Il est scout. Pour ne pas partir au STO, il se fait embaucher à Gardanne comme mineur. Pour un an. Il demeurera ensuite très attaché au monde de la mine et au monde ouvrier en général.
Grand Séminaire en 1940 à Saint-Joseph… Où passe un beau jour Mgr Roncalli le futur Jean XXIII, au langage pittoresque. Ordination sacerdotale le 1e mars 1947. Il est ensuite vicaire à Auriol, puis à Saint-Giniez.
En 1949, Pierre Gallocher rejoint Georges Mollard et l’équipe de Saint-Michel. Il y restera plus de 13 ans, présent à un quartier, surtout au monde des jeunes. Il est un spéléologue enthousiaste – il inventera nombre de grottes et de gouffres dans la Sainte-Baume et le Dévoluy – et déjà, un photographe expert.
1956, l’archevêque de Marseille, Mgr Delay congédie l’équipe de Saint-Michel, liées aux prêtres ouvriers qui viennent d’être interdits. Pierre est furieux. En signe de fidélité, il demande son incardination à la Mission de France, comme toute l’équipe de Molard. C’est une période difficile qui commence alors pour lui. Il se remet en question, se reproche de ne s’être « pratiquement pas situé vis-à-vis des jeunes dans la vérité d’une situation proche de la leur, du moins dans un certain partage de la vie qu’ils sont appelés à mener : travail, quartier ».
Il exprime sa « soif de plus en plus intense d’une vie sacerdotale la plus dépouillée possible, faite surtout d’une présence vraie dans ce monde, présence par le partage du travail, des aspirations, des espérances, de la vie… » Un ministère qui n’est alors reconnu ni par le diocèse ni par la Mission de France.
A Saint-Michel, Pierre a créé, aidé par un groupe d’amis, une colonie de vacances pour les enfants de la paroisse. Elle se trouve au hameau des « Gauthiers », à Cordéac, près de Mens, en Isère. Une séquence filmée nous le montre en 1957, montant visiter à motocyclette cette colonie dont il est le directeur. Nous sommes à « Casteldrac » - c’est le nom que les enfants eux-mêmes ont donné à la maison, le Drac coulant dans la vallée au-dessous…
Après le tragique incendie du « 5/7 » à St. Laurent-du-Pont, en novembre 1970, elle accueillera, une fois rachetée à crédit et remise aux normes, les activités d’une autre association, le groupe « Amitié Jeunesse » créé par Pierre avec les « Messieurs » de l’Œuvre Allemand pour les jeunes en difficulté du quartier de La Plaine. Elle s’y attachera dès lors à venir en aide à toutes sortes de personnes de tous âges en détresse ou exclues. Pierre anime le groupe avec Marie-Colette Trauchessec, religieuse devenue assistante sociale aux Baumettes de 1963 à 1967 avant d’intégrer le service de prévention et de réadaptation sociale des personnes prostituées, qui a travaillé avec lui lorsqu’il habitait rue Barthélemy à Marseille : ils y tenaient table ouverte pour le tout-venant chaque jeudi à midi.
Au fil des années, un compagnonnage spirituel s’instaure peu à peu entre elle et lui. Et une grande tendresse mutuelle. Un « amour d’amitié » à la manière de Claire et de François d’Assise. Fervent et platonique, ni l’une ni l’autre ne voulant renoncer à leurs vœux respectifs. « Nous avons tout partagé », dit aujourd’hui Marie-Colette, 96 ans. « Nous étions complémentaires et opposés. Il allait vers les autres et il trouvait Dieu ; moi, j’allais vers Dieu et je trouvais les autres »…
Une anecdote : en 1985, Pierre est monté chez le cardinal Etchegaray pour lui présenter Marie-Colette. « Je suis content qu’il y ait des petites lumières comme vous au-dessus de la ville », leur a-t-il dit. Je voudrais que vous soyez présents auprès des prêtres mariés ». Et c’est ce qui s’est passé, précise Marie-Co. Pierre a été le témoin de mariage d’un certain nombre de ses confrères et il en marié quelques-autres. A suivre !


Jacques Bonnadier