Le Bec de l’Aigle, témoin d’un continent disparu...

dimanche 25 juillet 2021
par  Renée Dray-Bensousan


Le Bec de l’Aigle, témoin d’un continent disparu entre Corse et Provence
22 juillet 2021, 01:39
Auteur Nicolas Charles, Géologue, PhD, BRGM


L’être humain aime attribuer aux nuages des formes familières, c’est aussi le cas pour les montagnes. À La Ciotat, près des célèbres calanques de Marseille, une forme évocatrice se détache de l’horizon : le Bec de l’Aigle. C’est un cap rocheux emblématique de cette partie du littoral provençal qui rappelle sans équivoque le profil d’une tête d’aigle.


L’éperon minéral s’élance vers la Méditerranée et exhibe une roche brune à gros galets que les géologues appellent « poudingue ». Cette roche s’est formée il y a environ 90 millions d’années. Elle témoigne d’un continent disparu, lointain cousin de la Corse et de la Sardaigne.


À cette période reculée, la région de La Ciotat se situe sur les bords d’un continent faisant face à la Provence et a priori solidaire de la Corse et de la Sardaigne. Ce continent s’érodait et les sables, graviers et galets transportés par les fleuves, se sont accumulés dans des deltas au pied de cette terre émergée. L’un d’eux constitue aujourd’hui le poudingue du Bec de l’Aigle. La disparition de cette « Atlantide » séparée de la Provence par une petite mer intérieure, est liée à la naissance de la mer Méditerranée qui découle de la rotation dans le sens inverse des aiguilles d’une montre de la Corse.


Le poudingue est ici un assemblage de galets arrondis composés de quartz, de grès, de schiste, de granite ou de calcaire, le tout cimenté naturellement. L’observateur verra que les couches sont inclinées d’une trentaine de degrés vers le nord, ce qui témoigne que l’ancien continent était plus au sud, car le dépôt des sédiments à l’époque se faisait en bordure littorale et les galets remontent rarement la pente.


Outre l’attrait esthétique de cette curiosité géologique, le sol siliceux et acide voit l’existence d’une végétation silicicole bien différente (châtaignier, lavande stoechas, ciste, palmier nain…) de celle des calanques calcaires toutes proches (chêne kermès, myrte, romarin, pin maritime…). La biodiversité guidée par la géodiversité en somme. Un balcon fleuri sur la mer et le temps.


Pour aller plus loin :
● Charles N., Blanc J.-J., Collina-Girard J., Monteau R., 2021. Guide des curiosités géologiques du Parc national des Calanques. BRGM Éditions-Parc national des Calanques, ISBN 978-2-7159-2737-7.
● Rousset C., Fournier R., 2021. Guide géologique des Bouches-du-Rhône – 2ᵉ édition. Omniscience, ISBN 979-10-97502-47-8.
● Collectif, 2020. La Géologie des Bouches-du-Rhône. Roches et paysages remarquables. BRGM Éditions-CD13, ISBN 978-2-7159-2718-6.



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